Quelques extraits de critiques lues sur le net et dans la presse.

KINORAMA
Inspiré de faits réels et adapté d’un roman d’Adam Pianko, cet album jette un pavé dans la mare des bonnes intentions grâce à un self-non-sense savoureux et à des références solides aux mœurs et aux personnalités marquantes de l’époque. Un cahier additionnel fait le parallèle entre les événements réels et la scénarisation nécessaire pour le passage à la bande dessinée. De quoi prendre une bouffée d’air frais, intelligente et originale.
Nathalie Rézeau
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BLOG.FRANCETV.COM
Avec l'aide de Nicolas Winz au dessin, Adam Pianko nous offre un récit drôle et un brin décalé qui va nous entraîner jusque sur les barricades de mai 68 avec un personnage inscrit dans l'air du temps, désireux de s'émanciper sur tous les plans. Un récit surprenant, replacé dans le contexte historique grâce à quelques notes rédigées par l'auteur lui-même et retranscrites à la fin de l'ouvrage.
E.G.
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Marx, Trotski et Samuel Opianski

Dans Casemate, un mensuel spécialisé dans la bande dessinée, un journaliste, Jean Pierre Fueri, a publié un article sur la notre. Il y rapporte un propos de Johan Sfar: « Si Karl Marx et Léon Trotski étaient issues de familles juives, a déclaré lors d'une interwiew l'auteur du Chat du rabbin, c'est que le poids de la tradition y était tellement lourd qu'il engendrait chez ceux qui y étaient soumis une irrésitible envie de changement et de liberté.
Cette remarque est pertinente, s'agissant de Karl Marx, de Léon Trotski, et de Samuel Opianski. Chez d'autres personnages issus de la même tradition, le poids de celle-ci a engendré des effets différents, parfois plus graves encore pour les intéressés. Chez Kafka par exemple, elle l'a amené à un état de désespoir, et de confusion très proche de la folie. Le phénomène est assez bien décrit dans « Lettre au père », un texte assez peu lu, moins connu en tous cas que ses grandes nouvelles et romans. C'est une lettre bien réelle que Kafka a écrite à son père, mais qu'il n'a jamais osé lui envoyer. S'il l'avait fait, la face du monde en eut peut-être été changée.
Adam Pianko

Aaah... Aaaaahh...


Atchoumm !

Huitième page /// Résumé: Une jeune femme vient offrir son corps au Rabbin pour qu'il interfère auprès de la Gestapo, qui vient d'arrêter son mari. C''est sa belle sœur, qu'il n'avait jamais rencontrée.
Dans cette scène le rabbin est choqué par la nudité de la femme de son frère, mais comme tout homme qui se respecte ça ne le laisse pas tout à fait indifférent.
Dans le scénario :
1_"Il se jette sur elle. Elle lui ouvre ses bras, ce qui n’empêche pas qu’il la
bouscule avec brutalité.
2_Ils se sont relevés."
Ca me semblait un peu trop direct. Je voulais plutôt montrer l'embarras dans lequel se trouvaient les deux personnages. J'étais tout d'abord parti de l'idée que Yeskeshel se prenait les pieds dans le tapis et trébuchait, mais il n'y avait aucune raison de mettre un tapis dans la pièce à l'ameublement sommaire, réservée à la méditation du religieux.
Le faire trébucher simplement sur le coup de l'émotion était plausible, mais difficile à faire passer en une seule case de BD et rien ne justifie d'un point de vue narratif d'en faire deux de plus. Je me suis alors souvenu de ce livre d'éducation sexuelle pour enfants (cheval de bataille de l'Education Nationale de l'époque, qui faisait rougir de confusion les enseignants et bien rigoler les élèves) qui circulait fin des années 70. On y expliquait l'orgasme en le comparant à un éternuement! Pourquoi pas? C'était un peu rapide mais plutôt bien vu, il arrivait encore bien fréquemment qu'on parle de cigognes et de choux aux gamins pour leur expliquer la naissance des bébés.
C'était donc un éternuement/orgasme qui allait projeter Yeskeshel sur sa belle sœur nue.
Le coup parti, il n'avait plus rien à faire allongé sur le corps de la femme. Honteux et involontairement "soulagé", il ne lui restait plus qu'à la rejeter brutalement.
Winz

Fantômes, pas si fantômatiques que ça.

Comparée à la juive, la religion chrétienne est bien organisée. Lorsqu'elles quittent ce bas monde, les âmes catholiques savent à peu près ce qui les attend. Quelques unes vont aller en enfer, et la plupart au paradis. Sur cette question si délicate, les Juifs n'ont rien prévu. Une fois décédés, qu'ils se soient bien conduits ou non, ils ne savent pas où ils doivent se rendre, en attendant le Jugement Dernier. Rien d'étonnant dans de telles conditions, qu'ils soient nombreux à vouloir rester là, à revenir sur les lieux qu'ils ont hantés vivants, se méler de la vie de leurs descendants.
Il y a quelques jours, j'ai entendu à la radio une écrivaine exposer cette théorie. Ayant pris l'émission en cours, je n'ai pas relevé son nom. Je ne sais même si elle était elle-même juive, probablement que oui, car elle expliquait ainsi la présente selon elle, courante, des fantômes dans les romans des écrivains issus de cette confession. Je ne sais pas si elle faisait allusion au mien.
"Malgré les circonstances particulières qui avaient présidé à son décès, Abraham Rabbinowicz bénéficia de funérailles en règle; Tandis qu'il reposait dans sa chambre à coucher, les parents, les voisins, virent lacérer leurs vêtements, et lui demander, par des cris véhéments, pardon pour tous les torts qu'ils lui avaient causés.......Huit hommes, choisis dans les meilleures familles, les chargèrent sur leur épaules, et l'emmenèrent au cimetière.
Le chemin à parcourir n'était que d'un kilomètre tout au plus. Mais le cortège suivit un chemin emprunta des chemins si détournés que la nuit était tombée quand il atteignit son but.
Cette lenteur extrême était de mise à tous les enterrements. Connaissant la propension de certains morts à s'occuper de la vie des vivants, ceux-ci avaient imaginé ce moyen ingénieux à concilier le respect qu'ils devaient à leurs aînés, avec une légitime aspiration à celui de leur vie privée: Embrouiller l'itinéraire du dernier voyage, afin que le jour où les morts s'aviseraient de l'emprunter dans le sens opposé, ils ne s'y retrouvent plus, et rebroussent chemin. Le pavé originel. Le roman.

Chronique d'un Grand Soir

Un soir, ayant raté le dernier métro après un collage d'affiches, je suis resté dormir au local de l'Organisation. Au milieu de la nuit, une militante venue de l'étranger, une camarade que je ne connaissais pas, est venue prendre place à coté de moi. Nous nous sommes présentés dans le noir. Elle avait quatre ou cinq ans de plus que moi. Elle disposait d'un sac de couchage, moi pas. Sous prétexte de froid, elle m'a invité à le partager. Toute la nuit, nous avons fait semblant de dormir, mais en nous caressant. Au petit matin, quand elle est repartie prendre le premier métro, je dormais pour de bon, si bien que là encore je ne l'ai pas vue. Je connaissais le corps de cette femme, la forme de ses seins, de son cul, mais de son visage, je n'avais pas la moindre idée, je ne l'aurais pas reconnue dans la rue. J'étais toujours puceau, pourtant j'avais joui je ne sais plus combien de fois. C'est une des expériences sexuelles les plus troublantes de ma vie.

A mon tour de passer aux aveux

On m'interroge souvent sur les relations entre les scènes du roman, ou de la Bd, avec des évènements réels, des évènements que j'aurais vraiment vécus. Ma réponse est que tout est vrai, même ce qui ne l'est pas. J'ai vraiment fait partie, en tous les cas, d'une organisation politique se réclamant du marxisme et de la révolution. Nous portions tous un pseudonyme sauf moi, qui avait refusé. Je ne craignais guère la police politique, et que Henri Weber, et Olivier Besancenot veuillent bien me pardonner, je ne croyais pas beaucoup à notre crédo. Je croyais en revanche que le sexe en dehors du mariage m'était interdit, j'étais donc puceau, et je m'étais convaincu que le jour où la révolution serait survenue, cette interdiction serait levée. Un peu comme les Témoins de Jehovah au Jugement dernier, ou certains musulmans à la présence de vierges au paradis attendant les martyrs de la réligion, je pensais, un peu confusément, je l'avoue, que ceux qui se seraient dévoués pour la révolution, verraient le moment venu les femmes leur tomber dans le lit. Adam Pianko

En arrière plan (1)

Mon rapport à l'école se détériora très tôt. Ce fut un long et très pénible parcours. Ma timidité et mon manque d'assurance me mettaient constamment en porte-à-faux avec tout ce qui se passait en classe. L'autorité du maître ou de la maîtresse, la présence des autres autour de moi, la rigidité de l'enseignement et des horaires, ainsi que le choix imposé des matières.

C’est donc à l’age de 8 ou 9 ans, vers 1967 /68 que j'ai commencé à trouver refuge dans le dessin. Un fait déclencheur fut le feutre marker, une grande découverte pour moi( et de l’époque ?) qui reléguait les crayons de couleurs aux oubliettes. Des couleurs magnifiques et une odeur enivrante…

Les examens, les dictées, les interrogations écrites et pires encore les interrogations orales, me terrifiaient à un tel point

que j’avais le sentiment d’être abandonné seul sur un champs de bataille au milieu des explosions d’obus, et de mes viscères déjà répandues dans la boue.
Winz

Traumatisme crânien...


Peau d'boudin



Peau d'Boudin.

J'avais adapté moi même, une nouvelle de Chester HIMES, dans des décors de la banlieue nord de Paris (Sarcelles, Villiers-le- Bel). FRANK ( scénariste de Golo et Baudoin ) en à réécrit les dialogues. Mes premières planches perso publiés par un éditeur en 1985. Je les ai présentés chez FUTUROPOLIS, lors du festival d'Angoulème. BAUDOIN était en charge de regarder les books. Il m'a tout de suite proposé de les publier dans la nouvelle collection X. Une collection qui n'avait rien à voir avec la pornographie, comme on pourait le supposer.

Chester Himes a eu la curieuse idée de mourir alors que je travaillais sur la BD...

Winz




15 ans (3)

C’est là que me parvient un roman par la poste. L’auteur, Adam Pianko, aimerait le voir adapter en BD. Patrick Deubelbeiss (vieux pote rencontré aux Art déco) et lui, se sont croisé dans une séance de dédicace. Patrick pour son album « Le monde perdu de Maple White » et Adam pour son roman « Le Pavé Originel ».

Le bouquin est agréable à lire et, « miracle ! » l’idée centrale du roman me plaît beaucoup ! Je me reconnais à 100% dans Samuel, le personnage, poursuivi par les fantômes de ses ancêtres. Personnification de la petite voix intérieure moralisante, celle qui poursuit sans cesse chacun d’entre nous, avec laquelle on fait constamment débat et qu’il est difficile de faire taire... Sinon par une grande révolution intérieure!

Je n’avais pas saisit à ce stade de la lecture à quel point le personnage de Samuel représentait symboliquement la société des années 60, prise dans le carcan moral et religieux et politique, hérité du 19 siècle.

Il ne restait plus qu'à s'attaquer à l'adaptation du livre. Ce que nous avons fait...

Quinze ans (2)

En fait c’est plus compliqué que ça.

Ce n’est pas seulement mon rapport au scénario qui m’a retenu si longtemps de refaire un album. C’est aussi parce que j’avais beaucoup de mal à assumer mon dessin. Je ne l’aimais pas du tout ( avec le recul je trouve que j’était dur avec moi-même, mais c’est pas certain… ). Quand une de mes Bd paraissait dans (A SUIVRE), il m’était impossible d’ouvrir la revue. Voir mes planches à côté de celles de Tardi et Pratt, me rendait malade. J’aurais du être flatté, j’en avais rêvé dès le n°1 d’(A SUIVRE) que j’avais eu entre les mains à sa sortie en 78. Mais non, c’était un supplice !

Alors je me suis réfugié dans l’illustration et la Bd pour enfants. Le public lecteur est vaste, mais on reste anonyme. Les gamins s’en foutent la plupart du temps de connaître l’auteur des dessins. Tant mieux. Comme l’a dit Utrillo « Je voudrais être illustre est inconnu ».

Pour ça rien de mieux que l’illustration, justement !

Donc j’ai fait plein de petites BD documentaires ou sur des personnages illustres (encore), particulièrement pour ASTRAPI et IMAGES DOC . Et puis j’ai aussi fait le « nègre », pas vraiment occulte, puisque mon nom figurait au générique, pour CATEL.

Merci Catel, pour qui et grâce à qui j’ai dessiné dans un style qui n’était pas du tout le mien ! J’ai fait pendant 2 ou 3 ans, 5 planches mensuelles de crayonnés pour la série BOB & BLOP qui paraissait dans IMAGES DOC. C’est grâce à ça que j’ai pu passer d’un style plutôt réaliste et travaillé à un style plus rapide et jeté.

J’ai également réalisé 4 storyboards d’albums pour la série BORO REPORTER, chez CASTERMAN. Là, j’ai compris mon goût pour la mise en scène et la narration. Et j’ai vraiment pris mon pied ! Ne plus s’emmerder avec les détails ! Ne plus s’emmerder à compter les boutons d’un uniforme chaque fois qu’on le dessine. Sur une seule planche de BD ça peut se répéter des dizaines de fois ! En plus il y à des lecteurs qui vous écrivent pour vous engueuler, si vous vous trompez, parce que eux ils les comptent !!

Finaliser une planche c’est l’étape qui m’a toujours paru la plus difficile à maîtriser. Du coup, stress. Le résultat n’étant jamais à la hauteur de ce que j’avais espéré.

Winz

Quinze ans déjà!

Quinze ans déjà!

Mon dernier album paru chez Casterman, AVATARS, date de 1994. Je n'ai rien fait pendant ces quinze années? Si bien sûr, j'ai beaucoup dessiné, illustré, même fait des tas de pages de BD, dans l'édition et la presse pour la jeunesse. Mais pas d'album.

Pourtant j'en ais lu des scénarii... Pas un qui ait retenu mon attention sur plus de trois pages. C'est marrant comme on sent qu'un scénario n'est pas fait pour soi dès les premiers mots. Pourtant ils devaient être bons pour certains, mais pas fait pour moi. Il y avait des scénarii de scénaristes professionnels; ça ce sont les plus difficiles à aborder, à mon avis. Bien rédigés, bien ficelés, bien découpés ! Prêts à l’emploi. On a l’impression qu’ils sont déjà dessiné!

Mes bras s’engourdissent instantanément rien qu’a la vue de l’agrafe qui lie le paquet de feuilles. Et puis les professionnels, ils mettent toujours au-dessus du titre : tome 1.Ils vous parlent tout de suite des trente cinq qui vont suivre. Aaargh ! J’ai pas choisit ce « métier » pour me coller un boulet aux cheville, à me cogner toute ma vie le même héro-maton.

Et puis il y a tous ces autres scénarii sur lesquels on tombe de-ci de-là, comme des barques échoués sur une cote après un coup de vent. Les mal rédigés, les mal ficelés, les mal foutus, les qui racontent rien ou des choses qui ne concernent que celui qui les à écrites…

Bref le temps passe !…

J’ai bien craqué sur quelques bouquins. Le problème, c’est qu’ils sont merveilleusement écrits, et bien trop épais. Pour pas les transformer en pas grand-chose, il faudrait dessiner des centaines et des centaines de pages.

Et puis il faut téléphoner pour convaincre (j’ai une grave phobie du téléphone, merde comment faire!), aller voir l’auteur, ses ayants droits, son éditeur (j’ai une grave phobie de tous ces gens, décidément ca se complique !!) …

Les convaincre de quoi d’ailleurs ? Que la BD c’est aussi bien que la littérature, aussi prestigieux que le cinéma. Que je suis un grand dessinateur et que je vais faire une œuvre remarquable… Non, je ne peux pas me déplacer, prendre le train, pour aller raconter des conneries pareilles…

Ah, je sais ! « La BD çà se vends à des millions d’exemplaires ! C’est le jackpot ! » Ca c’est un argument incontournable.

Bon, jusqu'à présent ça n’a pas été le cas, Mais ça va changer, tu vas voir ! Y’a pas que Titeuf ou XIII dans la vie !

Et puis là tout d’un coup mes bras s’engourdissent encore une fois . Surtout le droit...

Winz

Hanomag et Avatars